Documents biographiques

LE MANUSCRIT CLAIRAMBAULT

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f° 188-189 Rohan à Pontchartrain

Saint-Maixent, 17 décembre

« Monsieur, pour ce que je suis assez sujet aux calomnies, et la Cour assez facile à les croire à mon désavantage, je me suis résolu de vous avertir particulièrement de ce que je suis devenu depuis les dernières lettres que je vous ai écrit ; Donc partant de Fontenay je suis allé à Loudun où j'ai trouvé une assemblée fort disposée au service du Roi et à la tranquillité publique, n'ayant les intérêts et fantaisies des particuliers en nulle recommandation : Mais seulement le bien général : Sur quoi il faut que vous me supportiez si je vous dis que la maxime ordinaire qu'on tient en telles assemblées, qui est de les diviser et corrompre, n'apporte que de l'altération aux esprits et augmente avec raison les défiances dont vous nous accusez tant, il me semble qu'il serait plus utile au service de Sa Majesté de renvoyer promptement tous les députés dans les provinces avec le contentement que nos Edits de pacification nous doit faire espérer, que de les tenir ensemble longtemps sans leur rien répondre, ou bien les vouloir renvoyer avec de simples espérances ; vous avez maintenant une députation nouvelle, de gens de bien, lesquels portent peu d'articles, mais qui semblent nécessaires pour la conservation des sujets de Sa Majesté et pour son service ; s'ils sont répondus favorablement chacun s'en retournera dans sa province bénissant la bonté du Roi et s'assurant en sa bienveillance, si les choses passent autrement il faut craindre premièrement que l'assemblée ne se pourra séparer sans renvoyer dans les provinces, et en second lieu que quand même elle serait séparée, le fait de Béarn est capable de produire d'autres assemblées désagréables et les conséquences seront incertaines, donc tandis que vous en avez une permise par le Roi, bien composée et désireuse de son service, Au nom de Dieu ne la laissez passer sans en tirer le fruit que vous pouvez en la bien traitant, Voilà ce que quatre jours de séjour à Loudun m'ont fait remarquer important le service de Sa Majesté. De là j'ai passé à Saumur et suis allé à Angers où n'ayant trouvé la Reine Mère, je fus lui baiser les mains à Brissac où ayant séjourné un jour et demi j'allai voir M. le Prince de Guemené au Verger. A mon retour je trouvai la Reine [v] Mère à Angers où ayant séjourné encore un jour je pris congé d'elle avec bonne espérance d'avoir son consentement pour l'affaire qui m'avait mené là, à savoir l'échange de la forêt du Gavre contre une autre que j'ai en basse Bretagne. De vous mander de ses nouvelles c'est chose assez inutile y ayant laissé M. de Taraut que le Roi y avait envoyé. D'Angers j'ai repassé par Saumur, puis à Tours, où j'ai rendu visite à M. de La Trémoille, de là je suis venu en ce lieu où j'arrivai avant-hier résolu de m'y reposer quelque mois. Quant au rasement du Dognon je ne manquerai d'y travailler dès que j'aurai reçu mon argent, afin de pouvoir mettre par même moyen M. de Cressonnière en possession du gouvernement de Maillezais que le Roi lui a donné. Pour cet effet je viens tout présentement d'envoyer à Poitiers et à Fontenay les deux inscriptions du Sieur Boyer ; croyez-moi monsieur, vous me trouverez invariable en mes promesses : Pour l'affaire de mes prisonniers j'attends avec impatience de vos nouvelles, afin d'y travailler selon la volonté du Roi, j'espère que le Sr des Isles m'en apportera. C'est sur quoi je ne puis me taire et me faut pardonner si la juste douleur me fait dire que j'y ai été iniquement traité. Si durant mon séjour en cette province il se passe chose importante au service du Roi, je ne manquerai de l'en avertir et cependant d'y apporter ce à quoi mon devoir et ma charge m'obligent. Pour la fin je vous supplierai de me continuer vos bonnes grâces et me croire toujours, Monsieur.

f° 189 Rohan à Pontchartrain. Sans doute avec la précédente

«Monsieur j'oubliais à vous dire qu'avant de partir de Saint-Jean et ayant eu le vent qu'on voulait envoyer un jésuite pour prêcher les Avents et le Carême, j'envoyai quérir les Syndics catholiques pour leur dire que ce n'était la volonté du Roi qu'en telles places les jésuites y prêchassent, et que je serais bien aise qu'ils se pourvussent d'un prédicateur de quelque autre ordre, ce qu'ils me promirent et me firent connaître qu'ils étaient très aises de ce que je leur disais. Depuis pendant mon absence au déçu du peuple on y a envoyé un jésuite et M. l'Evêque de Saintes m'a écrit pour me prier de lui laisser prêcher, à quoi j'ai répondu que la volonté du Roi m'apparaissait contraire à sa prière, que je lui envoyais copie de l'article extrait du cahier de bas Languedoc depuis l'assemblée de Saumur présenté en l'an 1612 (dont je vous envoie copie) et le suppliais de vouloir plutôt pourvoir les catholiques de Saint-Jean d'un prédicateur d'autre ordre afin qu'ils ne fussent en ses jours de dévotion sans prédication. J'ajoute que j'apprends que telles entreprises ont été essayées en divers autres lieux en même temps, ce qui me fait soupçonner quelque dessein de vouloir altérer les esprits pendant notre assemblée. C'est pourquoi il me semble que le Roi doit y pourvoir par sa prudence, comme il a déjà fait à Saumur où sur pareil cas il a envoyé à M. Duplessis des défenses pour que lesdits jésuites ne prêchassent audit Saumur.

Ainsi que je fermais cette lettre est arrivé le Sieur des Isles lequel j'espère redépêcher dans quelques jours et faire réponse au Roi et à vous sur ses lettres et les vôtres par avance. Je vous dirai que je reçois votre réprimande à faveur, Mais que je suis sensible et supporte difficilement qu'en temps que je sers avec le plus de passion, on me picote et méprise comme un valet, et le tout pour des gens de sac et de corde. Je dépêche aussi présentement vers le Sieur de La Gestiere. »










                                     
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